"La Chauve-Souris", une opérette d’aujourd’hui pour Folies d’O !
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“La Chauve-Souris”, une opérette d’aujourd’hui pour Folies d’O !

 

 

« La Chauve-Souris », farce tragique… ou « La Vengeance de la chauve-souris »… La vengeance de Falke ou la descente aux Enfers d’Eisenstein. Comment une farce devient un véritable cauchemar, un face-à-face violent sur une musique à première vue légère… « La Chauve-Souris » est avant tout une farce. La farce est là, certes, mais elle n’est que le point de départ et le fil conducteur d’une vengeance amère. Falke, avec l’aide de son ami le Prince Orlofsky, revient le temps d’une soirée, méticuleusement préparée depuis des années, se venger d’une profonde humiliation vécue il y a plus de dix ans. Eisenstein y perdra beaucoup.

Benoît Bénichou, metteur en scène

La Chauve-Souris de Johann Strauss Fils (1825-1899) était à l’affiche du Festival Folies d’O, du 5 au 7 juillet. Cette célèbre opérette au rire grinçant a été interprétée par les plus grands artistes de l’opéra et par des chefs d’orchestre de renom. Dès son installation dans les gradins, le public du Domaine d’O est emporté dans un tourbillon scénique avec une succession de péripéties qui s’ajoutent à l’intrigue initiale de l’œuvre de Strauss, mais cela peut parfois porter à confusion. C’est d’abord l’entrée d’une spectatrice qui crie et qui est chassée par la sécurité, elle réapparaît finalement, puis se rend sur le plateau. Tout au long de la soirée, les effets de surprise accompagnent l’opérette réactualisée dont les airs entrainants de la valse sont connus. Nous sommes donc à l’Amphithéâtre du Domaine d’O, à Montpellier et non à Vienne comme le rappellent les personnages, car les textes ont été réadaptés au contexte. Les chanteurs ne portent pas les vêtements du XIXe, mais des tenues flamboyantes d’aujourd’hui, imprégnées tout de même du kitch des années 1980. Le décor se transforme et transpose le bal et la foule dans une boîte de nuit qui pourrait être Le Palace.

La Chauve-Souris, version Folies d’O

L’œuvre revisitée a bénéficié de nouveaux textes pour que l’opérette soit au plus près de l’actualité. L’un des personnages principaux, le séducteur Gabriel von Eisenstein à son arrivée parmi le public est appelé Monsieur Strauss-Khan… le public rit, surtout quand est évoquée l’affaire de la chambre d’hôtel de New York. Le principe du Festival Folies d’O est de proposer un répertoire au goût du jour. Jérôme Pillement, à la tête de l’Opéra Junior de Montpellier, est directeur artistique du Festival et chef d’orchestre de cette création. S’il s’agit de la onzième édition de Folies d’O, c’est la première fois qu’une opérette viennoise est proposée. A la musique de l’œuvre originale ont été ajoutés des extraits de bandes originales de films comme La Boum, et le groupe Muse remplace la polka dans un rythme qui rappelle ACDC. Quand la fête bat son plein, on revoit les chanteurs du Chœur de l’Opéra Orchestre de Montpellier, par leurs tenues, nous pourrions être dans les Années Folles. Mais le monde d’aujourd’hui rattrape l’opérette, les téléphones portables volent, on fait des selfies, des valises aux couleurs acidulées vont et viennent sur un plateau dense où se jouent parfois plusieurs saynètes. Quant au ténor, l’amoureux de l’épouse de Von Eisenstein, il reste dans son rôle et… on ne l’arrête plus ! Il interprète sans cesse les grands airs de l’opéra, de La Traviata à Carmen. Le décor très réussi s’inscrit dans une même unité de lieu, des écrans-miroir s’élèvent face au public, car La Chauve-Souris avec sa légèreté apparente dénonce les travers de notre société.

Une opérette sur le bal des apparences 

La pièce tourbillonne dans une bonne humeur et par quelques valses, et elle se teinte aussi de gravité avec une intrigue qui aboutit à la chute de Von Eisenstein ; ce pourrait être une nouvelle de Maupassant où tout semble lisse à première vue. Comme l’indique le metteur en scène, Benoît Bénichou : « Le théâtre est omniprésent dans cette œuvre. Il semble évident de ne pas écarter cette composante importante dont la plus évidente est la farce elle-même. Une farce/vengeance organisée. Une pièce dans la pièce… Un jeu violent dans une réalité. » La thématique principale est l’hypocrisie de la bonne société, d’hier à aujourd’hui, elle est traversée par les mêmes scandales. Dans cette pièce à plusieurs tiroirs, les rôles s’inversent et les élégantes se cachent derrière un loup pour s’offrir une autre vie, les personnages changent de rôles et de positions : la femme de chambre devient comédienne, le directeur de prison est une sorte d’agent d’artistes qui pourrait la recruter, et le comte finit humilié. Il y a plus de dix ans, il avait mené la danse avec une farce, mais il est à son tour piégé, son « ami » Falke l’avait mis en garde : « Tu as ruiné ma carrière, j’ai dû quitter Montpellier ! – Le public rit – Je t’ai préparé quelque chose pour ce soir. (…) Nous verrons bien qui gagnera le prix de la meilleure farce. » Pourtant, la fête avait si bien commencé : « S’amuser, s’amuser ! », chantait le Chœur…

Le jeu des chanteurs-comédiens de La Chauve-Souris est de haut niveau, ils chantent, ils dansent, ils jouent, il y a toute une dynamique avec de nombreux effets comiques. Il s’agit d’une opérette très difficile à chanter, tous les grands chanteurs d’opéra l’ont interprétée. Les chants en allemand dans l’œuvre initiale sont en français, et les textes ont été réécrits avec de nombreux clins d’œil contemporains. Les références musicales très élargies viennent du classique, du cinéma et aussi de l’univers enfantin. Les spectateurs sont souvent interpellés par des comédiens qui surgissent parmi eux. La mise en scène conçue d’écrans-miroir dénonce l’hypocrisie des mœurs ; nous sommes invités à un bal des apparences, on voit même une dame avec une bouche énorme en plastique qu’elle finit par perdre : la chirurgie et ses illusions ! Si La Chauve-Souris a été composée en 1874, cette satire reste actuelle. L’œuvre fait partie de la nouvelle saison de l’Opéra Orchestre national de Montpellier, elle sera interprétée par l’Opéra Junior. Nous retrouverons une mise en scène de Benoît Bénichou et à la direction, Jérôme Pillement. Ce chef d’orchestre a fondé le Festival Folies d’O, il y a onze ans, un rendez-vous estival devenu incontournable.

Fatma Alilate

La Chauve-Souris de Johann Strauss Fils

Amphithéâtre du Domaine d’O – Montpellier

Opérette en trois actes créée à Vienne, au Theater an der Wien, le 5 avril1874

Livret de Carl Haffner et Richard Genée d’après Le Réveillon d’Henri Meilhac et Ludovic Halévy

Direction musicale Jérôme Pillement

Collectif 1B2P/Tragédie Monstre : Mise en scène, Costumes Benoît Bénichou ; Scénographie Amélie Kiritzé-Topor ; Lumières Thomas Costerg; Assistante Mise en scène, Mouvement Anne Lopez

Avec : Gabriel von Eisenstein, rentier Armando Noguera ; Rosalinde, sa femme Diana Axentii ; Adèle, sa femme de chambre Mélanie Boisvert ; Falke, notaire Nicolas Rivenq ; Alfred,professeur de chant Marc Larcher ; Prince Orlofsky Guilhem Terrail ; Frank, directeur de la prison Lionel Peintre ; Blind, avocat Charles Alves da Cruz ; Ida,sœur d’Adèle Véronique Parize ; Frosch, gardien de prison Sylvère Santin

Chœur de l’Opéra national Montpellier Occitanie, direction Noëlle Gény

Orchestre national Montpellier Occitanie

Nouvelle production version française – Coproduction Folies lyriques, Opéra national Montpellier Occitanie

www.folieslyriques.com

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